Pour s’initier à la pratique de l’urbex, rien de tel que des visites virtuelles de lieux urbains abandonnés emblématiques. Démarrons le voyage en Belgique avec un château néo-gothique exceptionnel, puis partons en direction de la Louisiane, pour une visite peu commune d’un ancien parc d’attractions. Finissons enfin par un édifice urbain remarquable et désormais classé au patrimoine mondial de l’Unesco : une île japonaise qui définit à elle seule ce qu’est l’urbex et le ruin porn.
1. Le château de Noisy en Belgique
Le château de Noisy-Miranda ne figurera jamais dans la prestigieuse liste du patrimoine mondial de l’Unesco, ni dans une liste de sauvegarde des lieux urbains abandonnés. Pourtant, de nombreux défenseurs du patrimoine, des habitants et certains fans d’urbex se sont mobilisés pour que ce château survive. En vain. Le propriétaire l’a laissé à l’abandon faute de pouvoir (vouloir) l’entretenir, puis a ordonné sa destruction. Malgré une inscription sur une liste de sauvegarde du patrimoine wallon et l’engouement publique associatif local pour la sauvegarde de cette pièce architecturale remarquable, la destruction de cet édifice est opérée en 2016-2017.
Une merveille d’architecture néo-gothique s’est éteinte en Wallonie
Cinquante ans ont été nécessaires pour achever ce château de style néo-gothique. Il a été édifié entre 1866 et 1907 par l’architecte paysagiste anglais Edward Milner qui assure la structure du château en briques et les façades en pierres. L’architecte français Pelchner, poursuit l’édification, en s’occupant notamment de la tour centrale flanquée d’une horloge et haute de 67 mètres, en 1903. C’est la famille Liedekerke-Beaufort qui en est le propriétaire depuis le XIXe siècle. A la sortie de la deuxième guerre mondiale, la famille ne peut plus assumer les coûts d’entretien du château, qui sombre alors dans une lente dégradation.
Le château devient alors un lieu emblématique de Belgique pour la pratique de l’urbex, moment de son abandon à la nature. Des fans d’urbex du monde entier viennent pour le visiter et le photographier, précipitant son déclin. La dégradation des lieux s’accélère avec le nombre de visites illégales qu’il reçoit et il devient un site extrêmement dangereux à visiter. Le Comte de Liedekerke-Beaufort décide alors de détruire son château. Aucune société ne souhaitant le racheter pour le restaurer, son destin est scellé.
2. Le parc d’attraction de Six Flags Jazzland aux Etats-Unis
Ce parc d’attractions géant, situé en Louisiane, à la Nouvelle-Orléans, a été complètement inondé et partiellement détruit par l’ouragan Katrina en 2005. Il a fermé ses portes le 27 août 2005 et n’a jamais rouvert ses portes depuis. Ouvert en 2000, il n’a donc fonctionné que 5 ans et fait donc partie de la liste des nombreux lieux urbains abandonnés à travers le monde.
Un parc d’attraction américain qui refuse de mourir
Depuis sa fermeture, les animaux en ont fait leur domaine, ce qui ajoute au charme très post-apocalyptique du lieu, devenu une jungle luxuriante au fil des ans. Les animaux en tout genre ont trouvé leur paradis : sangliers, serpents et alligators sont les trois maîtres du parc. C’est l’un des points positifs des lieux laissés à l’abandon par l’homme : la nature reprend rapidement le dessus.
Le parc a depuis fait des incursions au cinéma dans de nombreux films : Deepwater Horizon, Jurassic World, Percy Jackson, Reminiscence… C’est une pratique courante pour les lieux urbains abandonnés à la végétation que de revivre sous l’œil des caméras de cinéma ou de télévision, le post-apocalyptique étant très à la mode depuis le début des années 2000.
Je vous recommande ce superbe film, réalisé par Teddy Smith en octobre 2010, qui permet d’en faire le tour, à la manière d’une visite guidée touristique.
Il a parfois été évoqué la possibilité de classement du site au patrimoine mondial de l’Unesco mais l’idée a visiblement été abandonnée au profit d’une possible réhabilitation du parc Six Flags en gigantesque parc aquatique. Peut-être une seconde vie pour ce parc d’attraction américain désormais laissé à l’abandon…
3. La ville de Hashima au Japon
L'île Japonaise de Ha-shima, non loin de Nagasaki, est aujourd'hui une ville fantôme et touristique, classée au Patrimoine mondial de l’Unesco en 2015. Hashima est inhabitée depuis 1974 et interdite d’accès jusqu’en 2009. Depuis, elle est ouverte aux touristes qui peuvent la visiter grâce à un parcours aménagé. Et depuis 2013, elle bénéficie même d’une numérisation des lieux par Google afin de rendre le lieu accessible virtuellement à tous.
Vous l’avez certainement déjà vu dans le 23e James Bond, Skyfall, dont elle est l’un des décors emblématiques.
Ha-shima ou Gunkan-jima, l’île navire de guerre insubmersible
Son nom fait directement référence à sa forme car elle ressemble aux cuirassés japonais de classe Tosa. Distante d’une vingtaine de kilomètres de Nagasaki, elle est située en mer d’Amakusa, une portion de la mer de Chine orientale. Elle mesure 480 mètres de long pour 160 mètres de large, soit une superficie de 6,3 hectares.
Cette île minière a été construite après la découverte d’un gisement de houille en 1887. Equipée de toutes les commodités (habitations, écoles, commerces, services, administrations, hôpital…), la géographie de l’île d’Hashima nécessite un plan d’urbanisation particulière pour s’adapter à son relief escarpé : tunnels, escaliers, étroits corridors… Les constructions partent en hauteur et optimisent le moindre espace vacant à tel point que l’on se croirait dans un dessin d’Escher !
La densité de population culmine en 1959 à 84100 hab/km² ce qui en fait l’une des plus fortes densité au monde à ce moment-là (environ 5,000 habitants). L’île d’Hashima connaît ensuite un rapide déclin, jusqu’à sa fermeture en 1974 : les bâtiments et les installations minières se délabrent alors rapidement, bien aidés par le passage régulier des typhons. Elle fait partie des lieux urbains abandonnés où la végétation reprend rapidement ses droits : la petite île devient ainsi un refuge pour les animaux marins.
Hashima et son inscription au patrimoine mondial de l'Unesco en 2015
L’île a été inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco en 2015 parmi 23 autres biens japonais sous l’intitulé : « Sites de la révolution industrielle Meiji au Japon : sidérurgie, construction navale et extraction houillère ». La majeure partie des sites classés se situent dans le sud-ouest du Japon et reflètent le fort développement industriel qu’a connu le pays entre le XIXe et le XXe siècle. Au plus fort de sa production, l’île était considérée comme une prison par les ouvriers coréens qui travaillaient au plus profond des mines. Cela se ressent dans son architecture concentrationnaire, idéalement exploitée grâce à la présence de l’eau, faisant ainsi d’Hashima une sorte de pendant japonais à Alcatraz.
Pour profiter de l’atmosphère de ces lieux urbains abandonnés (et pour certains disparus) je vous propose de visionner Paradis de rouille, le documentaire ARTE de 2018 qui en retrace les histoires.
Et si vous souhaitez découvrir un autre édifice désormais abandonné et classé au patrimoine mondial de l’Unesco je vous invite à découvrir la chocolaterie Menier à Noisiel : une aventure chocolatière depuis 1825.